Jour J

©Sabrina Pensalfini

Étapes de l’accouchement physiologique

Un AAD est un accouchement qui a pour but de respecter au mieux à la physiologie de la mère et de son bébé. Le suivi personnalisé par la même sage-femme tout au long de la grossesse et durant tout l’accouchement vise à respecter le rythme de la femme en travail. La sage-femme lui apporte sa présence continue, son expérience et ses conseils, garantissant ainsi sa sécurité.

Lors d’un accouchement médicalisé à la maternité, certains gestes médicaux peuvent perturber le déroulement d’un accouchement physiologique. Par ailleurs, chaque accouchement est unique.

La phase de latence

L’accouchement débute généralement par la survenue de contractions régulières, d’intensité croissante. On considère que le travail commence lorsque celles-ci se produisent toutes les 5 minutes pendant une à deux heures, (pour un premier accouchement). Elles peuvent être comparables à des douleurs menstruelles et sont généralement de courte durée. Le col s’ouvre alors jusqu’à 5 cm.

La durée de cette phase est variable : 2-3 à 24 ou même 36 heures parfois. Les émotions ressenties par la future mère sont, elles aussi, variables : euphorie, excitation, angoisse.

La phase active

Au-delà de 5 cm de dilatation du col, l’accouchement entre dans une phase active : les contractions s’intensifient et se rapprochent. Elles sont aussi plus longues. Le col de l’utérus se dilate en moyenne de 0,5 cm par heure, pour atteindre 8 cm. Cette évolution est très variable d’une femme à l’autre et peut dépendre de l’environnement dans lequel se trouve la femme.

La douleur des contractions peut se manifester dans le ventre, le bas du dos ou les cuisses et devenir difficile à gérer. Selon les femmes, un soutien du conjoint ou de la sage-femme devient alors nécessaire. Il se manifeste de multiples manières : besoin de présence, massages, contact visuel ou au contraire de solitude, de silence. Différentes techniques de gestion de la douleur existent pour soulager les contractions. Parvenir à rester en mouvement permet d’accompagner la descente du bébé.

La phase de transition (parfois dite « de désespérance »)

Cette phase, généralement assez courte, est aussi la plus intense : le col de l’utérus atteint sa dilatation complète (10 cm). Les contractions sont longues et se succèdent presque sans interruption. Il peut arriver que la femme pense qu’elle n’y arrivera jamais ou qu’elle va mourir. Selon ses besoins, l’entourage peut l’encourager, la rassurer et l’aider à rester concentrée. La respiration reste un appui à favoriser, de même que le mouvement.

©Sabrina Pensalfini

©Sabrina Pensalfini

Engagement du bébé dans le bassin et naissance

Une fois le col à dilatation complète, il peut y avoir une courte pause dans le travail : les contractions ralentissent voire s’arrêtent pendant 20 à 30 minutes. On nomme cette période la phase de quiétude. La mère et le bébé se reposent avant d’entamer la dernière phase. Cette phase est aléatoire, et peut être observée ou non, et durer un temps très variable, de quelques minutes à plusieurs heures)

Le bébé s’engage dans le bassin. Là encore, la durée de la descente est variable et peut durer jusqu’à 3 heures pour un premier accouchement. Les contractions restent longues et leur rythme soutenu. Quand le bébé est suffisamment descendu dans le bassin et sollicite les muscles périnéaux, on observe le phénomène de poussée réflexe, irrépressible. La seule situation où il ne faut alors pas se laisser aller à la poussée est l’existence de col résiduel qui pourrait alors être déchiré.

Il existe différentes écoles : il est généralement recommandé d’attendre que la sage-femme autorise la poussée et la guide au rythme des contractions. Dans d’autres cas, on peut se laisser aller à une poussée spontanée, dont le besoin se fait sentir dès la dilatation complète. On pousse en direction du rectum et de l’arrière du périnée, pendant une contraction, soit sur l’expiration en vidant ses poumons, soit en bloquant son souffle.

La délivrance du placenta

L’accouchement s’achève par la délivrance du placenta. Celle-ci a lieu de manière physiologique dans les 2 heures au maximum qui suivent la naissance du bébé. La sage-femme reste attentive et surveille la bonne rétractation de l’utérus. Une fois le placenta expulsé, elle vérifie son aspect, et notamment qu’il soit complet afin de prévenir le risque éventuel d’hémorragie de la délivrance.

Le risque de transfert (soit durant la grossesse soit durant l’accouchement)

Prévoir un AAD implique aussi d’avoir en tête que le risque de transfert existe, au cours de la grossesse jusque dans le post-partum immédiat.

Les données récoltées par l’APAAD en 2020 révèlent ainsi que 16,7% des femmes suivies pour un AAD ont été réorientées au cours de leur grossesse, 13,7% d’entres elles ont été transférées en cours de travail, 1,5% en post-partum immédiat et 1% des enfants ont été transférés pour différents motifs. Le transfert n’est donc pas nécessaire dans la majorité mais peut s’imposer de façon non-prévisible.

La plupart des sages-femmes demandent aux couples de signer un contrat d’engagement réciproque qui précisent les situations dans lesquelles le projet d’AAD (voir en section 1. La liste (non exhaustive) des critères excluant l’AAD) pourrait s’arrêter. Les modalités de transfert peuvent être discutées en amont. Le couple doit être prêt à entrer dans un parcours hospitalier classique si l’état de la mère et l’enfant le justifient.

De même, en cas d’indisponibilité de la sage-femme le jour J pour toute raison (autre accouchement en cours, congés, événement prévu à l’avance…), les futurs parents doivent être en mesure d’adapter leur projet d’AAD.

L’inscription dans une maternité est recommandée afin de faciliter une éventuelle prise en charge. Dans ce cas de figure, la rédaction d’un projet de naissance lu avec l’équipe peut permettre de rester acteur.rice de son enfantement.

Marie Bouchet

La gestion de la douleur

Choisir d’accoucher à domicile, c’est choisir de donner l’opportunité aux corps de la femme et de l’enfant d’accomplir leur potentiel créateur. Il s’agit d’un événement majeur dans l’existence de l’un et l’autre, auquel nous estimons nécessaire de s’être préparé.e.

La douleur ressentie lors de l’accouchement varie considérablement d’une femme à l’autre. Certaines décrivent des sensations puissantes dans des zones particulières : le ventre, le dos, les cuisses, le sexe… Leur intensité et leur fréquence sont croissantes au cours du travail. Les termes employés par les femmes pour les décrire varient et beaucoup parlent de « vagues ». Il est difficilement possible d’anticiper à quoi la douleur s’apparentera le jour de votre accouchement.

Nous vous conseillons donc de prendre le temps de découvrir la méthode qui sera la plus à même de vous soutenir le moment venu.

  • Se renseigner : Savoir, c’est pouvoir. Dans un premier temps, nous vous invitons à découvrir le déroulement d’une naissance physiologique : ses rythmes, ses étapes, les positions et attitudes qui peuvent faciliter le travail, ce qui au contraire, peut le ralentir ou l’empêcher… Il existe une longue bibliographie [lien vers « supports infos » qu’on pourrait rebaptiser « bibliographie »] d’ouvrages techniques, de méthodes écrites par des sages-femmes, de témoignages de parents dédiés à ce sujet… Internet regorge également de blogs, de comptes personnels ou de groupes permettant de dialoguer avec d’autres parents.
  • S’entourer : Parfois, il peut être souhaitable de rencontrer des parents ayant vécu un AAD auparavant. Leur point de vue permettra d’éclairer des questions techniques, de lever d’éventuelles appréhensions ou simplement de se sentir compris ! Le CDAAD peut servir d’interface aux parents, tout comme votre sage-femme ou une association de périnatalité locale.
  • Se préparer à la naissance avec une sage-femme formée à la physiologie : Nous vous recommandons de trouver une préparation à la naissance qui soit orientée vers la gestion naturelle de la douleur. Il existe de multiples techniques qui peuvent être explorées ou combinées.

Nombreuses sont les méthodes de gestion naturelle de la douleur à avoir fait leurs preuves. L’enjeu essentiel consiste à trouver celle qui vous conviendra le mieux. En voici une liste non-exhaustive :

Respiration :

  • Respirer : C’est sans doute ce par quoi il faudrait commencer… Face à une grande douleur, le premier soutien est le souffle. Souffler évite la crispation des muscles, permet une détente de l’esprit et éloigne la panique. La respiration offre l’opportunité d’accompagner les contractions plutôt que de lutter contre. Il existe différents types de respiration : abdominale, thoracique, etc, qui sont mobilisées par toutes les techniques énumérées ci-dessous.

  • Chant prénatal : Parfois, on peut ressentir le besoin de faire d’émettre des sons pendant la phase de dilatation du col de l’utérus. Il peut s’agir d’un phénomène instinctif car il existe un parallélisme entre les différents sphincters du corps, notamment entre le larynx et l’utérus, d’où la fameuse phrase « bouche molle, col mou ». La vocalisation accompagne l’ouverture et le passage de l’enfant. De la même façon que le chant utilise le périnée pour soutenir la voix, la voix peut soutenir le périnée dans son effort d’assouplissement. De plus, les vibrations de la voix permettent d’amoindrir la douleur.

La technique du chant prénatal peut être abordée dans certains hôpitaux ou avec des professeur.e.s de chant.

Eau chaude :

  • l’utilisation de compresses d’eau chaude sur certaines zones (ventre, dos) peut atténuer la sensation de douleur.

  • Le bain est recommandé à partir de la phase active. Il a des vertus relaxantes et antalgiques et peut accélérer le processus de dilatation. Il est possible de l’utiliser jusqu’à la délivrance et même d’y donner naissance (voir la rubrique “Naissance dans l’eau”).

Visualisation :

  • Sophrologie : Vous pouvez prendre quelques séances de sophrologie avec un.e sophrologue ou une sage-femme afin d’apprendre à respirer et créer une bulle dans laquelle vous immerger. Cette méthode peut être plus facile et rapide à mettre en place que la méditation si vous n’en avez pas l’habitude.

  • Hypnose : L’hypnose est une méthode permettant de se mettre en état modifié de conscience (EMC) et en état de relaxation afin notamment de ne plus ou de moins être sous l’emprise du mental et des peurs, mais en confiance et en attitude positive. Elle peut être proposée par une sage-femme formée à cet effet.

  • Méditation : La méditation vous aidera à rester centrée et calme. Pour un bon résultat, il est recommandé de commencer tôt dans la grossesse. Il existe plusieurs approches de la méditation : pleine-conscience, mantras, méditations à partir d’objets, etc…

Points anti-douleur :

  • Méthode Bonapace : Julie Bonapace a mis au point une méthode de gestion de la douleur à pratiquer en couple, à partir de zones « gâchettes » (points sensibles supposés détourner la douleur de l’utérus).

©Natasha Vayre

Postures :

  • Méthode De Gasquet : Bernadette de Gasquet a été kinésithérapeute avant de devenir médecin. Elle s’est beaucoup intéressée aux questions posturales dans le phénomène de la naissance et a publié de nombreux ouvrages sur les positions d’accouchement. Son conseil, que vous retrouverez partout : restez en mouvement pour accompagner la naissance du bébé et ouvrir votre bassin. Les positions qui vous sembleront les moins douloureuses sont certainement les bonnes. La douleur liée aux frottements de la tete du bébé sur les os du bassin peut être réellement réduite par des postures adaptées, inspirées instinctivement par la femme, qui facilitent la progression mécanique du bb ds le bassin.
  • Yoga prénatal : Le yoga prénatal peut favoriser l’apprentissage d’une bonne gestion du souffle. L’entretien de la mobilité et la musculature contribuent au maintien d’une bonne qualité de vie pendant la grossesse. Il offre l’opportunité aux femmes de s’approprier leur corps changeant et de se familiariser avec des postures qui peuvent être bénéfiques à la gestion de la douleur et la descente de l’enfant pendant le travail.
  • Danse prénatale : Technique en développement, la danse prénatale vise à accompagner la descente du bébé et à favoriser l’ouverture du bassin. S’il ne s’agit pas d’une technique de gestion de la douleur à proprement parler, la mobilisation du corps apporte un soulagement des tensions et peut offrir une issue à des postures douloureuses.
  • L’eutonie : L’eutonie est une méthode développée par Gerda Alexander. Elle repose sur une approche corporelle globale, c’est-à-dire une attention portée aux sensations du corps et au développement de ses perceptions corporelles, en lien avec l’esprit et l’environnement immédiat.

Être entourée… ou pas ! Selon les personnes, selon les phases de travail, certain.e.s trouveront un réconfort auprès d’un proche : le futur père, la sage-femme ou une accompagnante qui pourront offrir un soutien matériel (apporter de l’eau, éventer, distraire, masser, soutenir…) et psychologique (être présent, caresser, rassurer,…). Pour d’autres, la solitude sera le lieu de la sécurité. Il faudra alors que les accompagnants soient finement à l’écoute des besoins de la future mère et en mesure de l’aider à les remplir.

Quand l’AAD n’est plus possible

Dans quels cas ?

Votre état de santé et celui de l’enfant à naître est susceptible d’évoluer tout au long de la grossesse ou de se dégrader, rendant l’AAD fortement contre-indiqué. La sage-femme qui vous suit vous détaillera les éléments qui nécessitent une prise en charge hospitalière et vous adressera à un centre hospitalier. Cela ne signifie pas pour autant la fin de son suivi car elle pourra continuer à vous préparer à l’accouchement en tenant compte de votre état de santé et de celui du bébé.

En l’absence de recommandations nationales et de la diversité des situations, il n’est pas possible de dresser la liste exhaustive des pathologies nécessitant la réorientation vers un établissement de santé. En effet, certaines pathologies peuvent entraîner une contre-indication formelle de l’AAD, d’autres bénignes peuvent être sujettes à discussion avec votre sage-femme et/ou une équipe pluridisciplinaire, selon votre état général et la présence ou non de facteurs de comorbidité.

Quand la situation rend nécessaire un déclenchement ou une naissance par césarienne programmée mais aussi à chaque fois qu’une intervention médicale est proposée, il est intéressant d’aborder la question avec l’équipe chargée des soins sous l’angle de la balance bénéfice/risque et de l’urgence à intervenir.

Pour aider à une décision éclairée, l’outil BRAIN peut constituer une ressource sur laquelle s’appuyer.

Exemples de contre-indications strictes à l’AAD :

  • Gémellité
  • Diabète gestationnel non-stabilisé
  • Pré-éclampsie
  • Présentation autre que céphalique (siège, transverse…)
  • Terme de 41SA+6j dépassé
  • Troubles hypertensifs non-stabilisés
  • Portage du streptocoque B avec signes infectieux
  • Cholestase
  • Parfois : utérus cicatriciel (situation controversée)

En cas de désistement de votre sage-femme pour des raisons d’indisponibilité ou de divergences de vues, celle-ci doit, selon le cadre de la déontologie médicale, vous rediriger vers un.e autre professionnel.le de santé.

Transfert du dossier en maternité

Quand un projet d’accouchement à domicile n’est plus possible, la sage-femme adresse sa patiente à un centre hospitalier. La patiente prend alors rendez-vous pour ouvrir un dossier selon un suivi classique. Les rendez-vous médicaux sont assurés par l’équipe médicale locale. La préparation à l’accouchement peut être poursuivie avec las age-femme libérale si tel est le souhait du couple parental.

Est-ce l’abandon total du projet d’accouchement physiologique ?

L’abandon du projet d’AAD ne signifie pas automatiquement la renonciation à tout accouchement physiologique. Les protocoles variant d’un établissement à l’autre, il est possible que malgré des antécédents médicaux, vous puissiez néanmoins prétendre à un accouchement respectueux du rythme de votre corps et de celui de votre bébé. Nous vous invitons à vous renseigner et  à comparer les maternités proches de votre domicile.

Le projet de naissance permet d’établir une base de discussion à l’équipe que vous allez rencontrer. Si tous vos souhaits ne peuvent plus être pris en compte suivant votre état de santé, il peut vous servir à discuter des aménagements qui vous permettent de rencontrer votre enfant dans des conditions affectivement et cliniquement satisfaisantes. Vous pouvez, par exemple, le travailler avec votre sage-femme AAD afin de maintenir le lien avec votre projet initial.