FÀQ – Les idées reçues sur l’AAD
« L’AAD est interdit en France »
L’AAD se trouve dans une situation paradoxale, en France : rien ne l’interdit, il est donc possible et légal d’accoucher chez soi. En revanche, tout acte médical doit être assuré… Ce qui rend l’AAD difficile d’accès, c’est le petit nombre de sages-femmes qui le pratiquent car l’immense majorité d’entre elles ne peut financer une assurance RCP pour sa pratique. Il existe actuellement une forme de tolérance tacite pour la pratique de l’AAD non-assuré en France. Pour autant, revendiquer une assurance à un prix en rapport avec la rémunération des sages-femmes est donc un enjeu majeur de lutte pour l’AAD.
« L’AAD est dangereux »
De nombreuses enquêtes internationales démontrent qu’en l’absence de facteurs de risques, accoucher chez soi n’est pas plus dangereux qu’accoucher à l’hôpital. Les sages-femmes AAD évaluent soigneusement la situation physique et psychique des couples et révisent l’accompagnement lorsque cela devient nécessaire au cours de la grossesse. En France, l’APAAD (Association Professionnelle pour l’Accouchement Accompagné à Domicile) publie chaque année un rapport à partir des données collectées par les sages-femmes AAD, disponible sur son site internet.
L’AAD est proposé aux femmes en bonne santé dont la grossesse est physiologique.
En cas de complication per-partum, un transfert à l’hôpital est organisé dans les meilleurs délais. C’est pourquoi il est décisif que l’AAD soit bien intégré à l’offre de soins : une collaboration efficace et respectueuse entre les professionnels des réseaux périnataux locaux (sages-femmes libérales, sages-femmes hospitalières, gynécologues-obstétriciens, SAMU et ambulanciers, PMI, etc…) est la condition à des AAD dont les risques soient les plus bas possibles.
Enfin, l’APAAD travaille à la publication d’un guide pratique de l’AAD pour 2022, afin d’uniformiser les pratiques sur le territoire et de donner un cadre fixe à la pratique des AAD.
« L’AAD est rétrograde »
Accoucher à domicile est une affaire de choix. On n’accouche pas à la maison aujourd’hui comme on pouvait y accoucher il y a 100 ou 200 ans.
Les conditions de vie et d’hygiène des femmes ont significativement évolué : nous sommes aujourd’hui en meilleure santé physique, bénéficions d’une meilleure alimentation et d’une meilleure prise en charge médicale lorsque celle-ci est nécessaire. Le nombre d’enfants, facteur possible de morbidité, s’est réduit. Les conditions de vie des familles se sont aussi grandement améliorées : l’accès à des logements salubres, avec accès à l’eau courante et à l’électricité, une meilleure détection des éventuelles pathologies avec l’évolution de la médecine, la découverte de l’aseptie et des antibiotiques, etc limitent les risques environnementaux.
Au contraire, l’AAD est aujourd’hui un acte qui allie l’intimité à la sécurité : les grossesses sont suivies, les risques connus en amont et écartés. Les sages-femmes AAD sont formées, équipées et prêtes à transférer leurs patient.e.s au moindre danger.
Enfin, l’AAD offre ce que l’hôpital a bien du mal à offrir aux parturientes : la présence rassurante d’une sage-femme en continuité pour une femme durant toute la durée du travail et de l’accouchement, du soutien et du temps puis un suivi personnalisé du couple et du nouveau-né, soit selon nous une vision moderne et humaniste d’accueillir la vie.
L’accouchement à domicile est actuellement le seul moyen, avec l’accompagnement en plateau technique, de réaliser l’idéal de “one to one” revendiqué par le mouvement “1 femme = 1 sage-femme”.
« L’AAD est une démarche irresponsable »
L’AAD doit s’envisager dans un esprit de responsabilité éclairée.
Le projet de naissance à domicile est d’abord un choix de la femme et à ce titre ne peut pas être qualifié « d’irresponsable ». Il est inconcevable de discuter le choix que font les femmes pour leur accouchement.
Les raisons de choisir un AAD sont multiples et valables. Si une femme décide que son besoin d’intimité prime sur la médicalisation de la naissance de son enfant, si elle est prête à assumer la préparation de la naissance, de son logement, à s’entourer d’une professionnelle pour l’accompagner, alors sa démarche est a priori tout sauf irresponsable.
En outre la sage-femme sollicitée a pour mission d’apporter toutes les informations objectives nécessaires pour ce choix s’inscrive dans un « consentement éclairé » (code de déontologie, droits des patients article R. 4127-35)
Tout le travail du CDAAD, conjointement avec l’APAAD, consiste à œuvrer pour offrir aux parents les meilleures conditions d’accueil de leur enfant. Ces conditions ne pourront être réunies que si l’ensemble des professionnels de la périnatalité s’unissent pour aboutir à des conditions de prise en charge des naissances extrahospitalières.
De plus, l’AAD est d’abord une relation humaine BILATÉRALE qui doit se bâtir sur des notions de respect et confiance entre un couple avec des attentes, interrogations, souhaits et de l’autre un professionnel de santé avec des compétences et un regard non seulement humain mais aussi technique, c’est un projet qui se construit dans le temps pour aboutir.
©Sabrina Pensalfini
« L’AAD, c’est naturel »
Si l’enfantement est un processus naturel et n’est donc pas une maladie, et dans 90% des cas devrait rester naturel si les interventions médicales ne viennent pas perturber le processus, il serait naïf de nier qu’il peut comporter une part de risque. Cet argument est d’ailleurs le premier évoqué par les détracteurs de l’AAD.
L’AAD est un accouchement non-technicisé mais pas non-médicalisé : on recourt en première intention à l’observation des signes cliniques pour s’y adapter plutôt que d’employer des protocoles standardisés ou l’observation de constantes via des machines.
Les sages-femmes accompagnant les accouchements à domicile ne refusent pas le recours à la médecine et sont en capacité d’agir face à une situation à risque modéré. Ainsi en va-t-il de la surveillance du travail (monitoring) ou des soins d’urgence (matériel de réanimation). L’hygiène est aussi un aspect fondamental dans la gestion du risque infectieux et celle-ci est garantie par le respect de protocoles nationaux tels que définis par la HAS.
Il est toujours légitime de discuter avec le/la professionnel.le de l’emploi de telle ou telle technique ou matériel (ex : monitoring, injection d’ocytocine de synthèse…). Des ajustements sont possibles, dans le respect de la sécurité de la future mère, de l’enfant à naître et de la responsabilité juridique du/de la professionnel.le.
« L’AAD permet d’éviter les violences obstétricales et gynécologiques »
Il peut arriver qu’une femme se tourne vers l’AAD suite à une expérience traumatique survenue à l’hôpital… Cette situation, légitime, ne doit pas faire oublier que les violences obstétricales et gynécologiques sont susceptibles de se produire dans toute situation dans laquelle la relation entre le ou la soigné.e et le ou la soignant.e est mise à mal par un manque de communication ou de prise en compte des besoins.
Ceci peut aussi survenir dans le contexte d’un AAD. Pour l’éviter, nous vous recommandons d’abord d’établir une relation de confiance avec votre soignant.e et de discuter en amont avec lui.elle de vos besoins, vos souhaits et vos limites et d’entendre également les siennes.
Il peut arriver que, dans une situation d’urgence, la communication soit rompue et blessée. Dans ce cas, nous vous invitons à prendre un temps de parole avec le ou la soignant.e pour pouvoir comprendre et exprimer votre douleur. Le CIANE propose une cellule d’écoute gratuite permettant d’ouvrir un espace de parole afin de pouvoir dépasser la frustration, la colère, pour essayer de comprendre.
« L’AAD, c’est mieux que l’accouchement à l’hôpital »
Il n’y a pas de meilleure ou de moins bonne façon d’accoucher dans l’absolu. Comme pour la contraception, chacune a ses avantages et ses inconvénients.
La meilleure façon d’accoucher est donc avant tout celle qui vous conviendra, dans laquelle vous trouverez le plus de sécurité et de confort physique et émotionnel.
Chaque naissance est unique et imprévisible, c’est pourquoi il est important de s’y préparer tout en gardant à l’esprit qu’il n’y a pas d’échelle de valeur : une césarienne bien vécue vaut autant qu’un accouchement physiologique et vice-versa.
En résumé, être pour l’AAD, ce n’est pas : être contre toute médicalisation de la naissance, contre les équipes soignantes, contre l’hôpital ni contre les interventions lorsqu’elles sont nécessaires. Être pour l’AAD, c’est aussi défendre la liberté de choix du lieu de naissance mais aussi plus largement le droit de toutes les femmes à disposer de leur corps.
©Sabrina Pensalfini