Mûrir son choix
Marie Bouchet
Pour avoir lieu dans de bonnes conditions physiques et psychologiques pour la mère, l’enfant et leur entourage, tout accouchement se prépare tout au long de la grossesse. Ceci est particulièrement vrai dans le cas de l’AAD, situation dans laquelle le couple parental se trouve placé dans une grande autonomie et doit être à même de prendre, avec la sage-femme, les décisions qui s’imposent au fur et à mesure des événements.
Naître en France : tour d’horizon des options
En France, différentes possibilités s’offrent aux couples se préparant à accueillir un enfant.
Naître à la maternité
La maternité est l’option majoritaire et celle qui est systématiquement proposée aux futurs parents. Il y a un peu moins de 500 maternités en France (contre 800 il y a 20 ans). Celles-ci sont classées en 3 niveaux en fonction de leurs possibilités de prise en charge des mères et des nouveaux-nés :
Maternités de niveau I : Accueillent les mères dont la grossesse ne présente pas de complications particulières, pour des nouveau-nés nés à terme (à partir de 37 SA). Elles disposent d’un bloc opératoire et sont donc à même de gérer des césariennes. Un gynécologue-obstétricien, un chirurgien-anesthésiste, un pédiatre et une équipe de sages-femmes sont présents de manière systématique.
Maternités de niveau II : possèdent un service de néonatologie et/ou de soins intensifs sur place ou à proximité. Elles peuvent accueillir des prématurés à partir de 33-34 SA.
Maternités de niveau III : sont spécialisées dans le suivi des grossesses pathologiques. Elles disposent d’une unité de réanimation néonatale et peuvent accompagner les femmes lors d’accouchements prématurés.
Malgré ce classement par niveau, les protocoles peuvent être relativement différents d’un établissement à l’autre. Selon vos souhaits, il peut être souhaitable de rencontrer plusieurs équipes et de leur présenter votre projet de naissance afin de connaître leur positionnement. Selon la loi française, vous êtes libres de choisir votre établissement de soin.
Naître en maison de naissance
Répandues dans les pays voisins depuis plusieurs décennies, les maisons de naissance sont à l’essai en France depuis 2016. Au nombre de 8 (l’ouverture d’une douzaine d’autres est à l’étude en 2020), les maisons de naissance sont gérées par une équipe de sages-femmes et sont adossées à une maternité partenaire en cas de complications. L’accouchement en maison de naissance, tourné vers la physiologie, est une alternative à l’accouchement médicalisé et s’adresse à des femmes en bonne santé, dont la grossesse s’est déroulée sans complications ni pathologie.
Pour vous informer et trouver la liste des maisons de naissance et celles en projet, vous pouvez vous rendre sur le site de l’association Accoucher en Maison de Naissance.
La maison de naissance privilégie le suivi global et s’appuie sur des méthodes naturelles de gestion de la douleur.
Naître en plateau technique
Certains hôpitaux mettent à disposition des sages-femmes libérales des salles de travail afin que celles-ci accompagnent leurs patientes au moment de l’accouchement. Ce dispositif garantit aux femmes de donner naissance à leur enfant avec un.e professionnel.le qui connaît leur dossier médical, leurs attentes et leur environnement émotionnel et familial.
Il existe des plateaux techniques dans un certain nombre d’hôpitaux mais ceux-ci sont inégalement répartis entre les régions. L’hôpital le plus proche de chez vous ou votre sage-femme pourra vous renseigner.
Naître à domicile
Lui aussi largement développé dans certains pays voisins (Pays-Bas en tête, Belgique, Allemagne, Royaume-Uni, Suisse, etc…), l’accouchement à domicile ne représente qu’entre 0,2% et 0,5% des naissances chaque année. Ce chiffre toutefois ne reflète pas la demande des femmes françaises puisqu’une enquête menée par l’IFOP à la demande de l’APAAD révèle qu’en 2021, 37% des futures mères souhaiteraient accoucher à domicile si elles en avaient la possibilité. Le formulaire de recensement des refus d’AAD relève également une forte augmentation des demandes sur cette même année 2021.
Un accouchement accompagné à domicile a lieu sous les yeux d’une sage-femme expérimentée et formée, soucieuse du respect de l’intimité mais aussi de la sécurité de la femme et de l’enfant naissant. Ce moment est préparé durant toute la durée de la grossesse, au fur et à mesure que la sage-femme et le couple font connaissance.
L’AAD s’adresse à des femmes en bonne santé, dont la grossesse s’est déroulée sans complications ni pathologie (voir la liste des critères / lien interne). Sont également évalués les antécédents médicaux et obstétricaux qui pourraient impacter le scénario de l’AAD a venir. Lors des consultations de suivi de grossesse, la sage-femme évalue les motivations du couple afin de s’assurer que les futurs parents savent à quoi ils s’engagent, notamment en termes de responsabilités, d’organisation, etc… Un contrat d’engagement réciproque peut être rédigé afin de clarifier les obligations de chacune des parties.
Pour l’AAD ou contre l’hôpital ?
Au cours du suivi, le couple peut être invité à réfléchir en profondeur aux motivations de son choix. Ce discernement est important : mettre des mots sur des envies, besoins ou limites permet de réfléchir avec votre sage-femme à des aménagements et solutions adaptés à votre vécu.
Parmi les arguments souvent évoqués pour le choix de l’AAD, on retrouve les termes suivants : la recherche d’un “empouvoirment”, le respect de la physiologie et de l’accouchement naturel, le confort, l’intimité notamment en post-partum, la dimension familiale, une véritable place faite au co-parent, le respect du rythme des personnes et de la relation soigné.e-soignant.e, la sécurité, la qualité de l’accompagnement, le lien au féminin dans l’acte d’enfanter.
La prévention contre l’hôpital et les antécédents de violences gynécologiques et obstétricales sont des motivations à l’AAD qui existent et reviennent régulièrement dans les discussions et les études. Nous souhaitons qu’ils soient entendus et pris en charge. Toutefois, statistiquement, beaucoup de femmes accouchant à domicile ne se disent pas opposées à l’hôpital et même plutôt favorables à une prise en charge hospitalière en cas de pathologie avérée. Le domicile n’est donc pas un refuge suite à un traumatisme mais bel et bien un appel à vivre l’enfantement autrement.
Il n’en demeure pas moins que la question des violences gynécologiques, mentionnée par une partie des femmes, est un sujet à prendre au sérieux. Il peut être abordé en début de grossesse afin de limiter l’éventuel impact d’un traumatisme sur l’enfantement futur. La nécessité d’un transfert pouvant toujours apparaître, il est important d’avoir au préalable traversé un temps de parole et de guérison.